Quand on parle de sport, on pense souvent aux performances, mais pour nous, les femmes, bouger peut aussi être un véritable allié pour mieux vivre nos règles. L’activité physique peut nous aider à soulager la douleur, à améliorer notre humeur et à nous sentir bien dans notre corps, même pendant les moments les plus délicats de notre cycle menstruel. Dans cet article, on vous explique comment le sport peut devenir votre meilleur ami pendant cette période, mais aussi quelles précautions prendre pour éviter les désagréments.
Bouger pour soulager les douleurs menstruelles
Les douleurs menstruelles, ou dysménorrhées, sont un vrai calvaire pour beaucoup d'entre nous. Pourtant, bonne nouvelle, il a été prouvé que faire du sport peut aider à atténuer ces douleurs : des activités douces comme la marche, le yoga ou la natation peuvent améliorer la circulation sanguine, ce qui réduit les crampes. (1)
Une étude réalisée par l'Université de Lyon a également démontré que la pratique régulière d'exercices physiques doux pouvait significativement réduire l'intensité des douleurs menstruelles en favorisant la circulation sanguine et en relaxant les muscles abdominaux. (2)
Alors, au lieu de se morfondre complètement pendant vos règles, essayez de bouger un peu : cela peut vraiment faire la différence !
Les endorphines : vos meilleures amies pendant les règles
Quand vous faites du sport, votre corps libère des endorphines, souvent appelées « hormones du bonheur » . Ces petites merveilles ne se contentent pas de vous faire sourire : elles diminuent la sensation de douleur et vous donnent un coup de boost moral. Selon une étude menée par l’Université de Lausanne en Suisse (3), la libération d’endorphines pendant l’activité physique contribue à une réduction des douleurs menstruelles, tout en améliorant l’humeur générale des femmes pendant cette période.
Mais ce n’est pas tout ! l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Inserm) (4) précise que les endorphines libérées lors de l’exercice agissent comme des analgésiques naturels, aidant à diminuer la perception de la douleur.
Retenez donc qu’en pleine période menstruelle, quand vous vous sentez fatiguée ou un peu à plat, une petite séance de sport (même modérée) peut vous faire un bien fou et vous redonner le sourire.
Les effets du cycle menstruel sur votre énergie
Le cycle menstruel a un impact important sur l’énergie et les performances physiques de notre corps. Chaque phase du cycle influence non seulement les sensations physiques, mais aussi les capacités à s’entraîner. Les chercheuses Juliana Antero et Alice Meignié de l’Institut National du Sport, de l'Expertise et de la Performance (INSEP) ont étudié ces variations hormonales et énergétiques, en identifiant des moments spécifiques où le corps répond différemment aux efforts physiques. (5)
Phases du cycle menstruel et énergie
Schéma représentant les quatre sous-phases du cycle menstruel selon son influence sur la physiologie des sportives: la menstruation, la phase pré et ovulatoire, la phase post-ovulatoire et la phase prémenstruelle. – Le Cycle menstruel, Juliana Antero.
Phase folliculaire (après les règles) :
Pendant cette phase, nos niveaux d'œstrogènes augmentent, tout comme notre énergie. Nous nous sentons souvent plus fortes et prêtes à nous entraîner avec plus d’intensité. L’augmentation des œstrogènes favorise l’utilisation des glucides comme source d’énergie, ce qui améliore nos performances physiques et notre récupération musculaire. (6) Les chercheuses Antero et Meignié recommandent d’augmenter l’intensité des entraînements durant cette période pour maximiser les performances physiques. (7)
Ovulation
Autour de l'ovulation, notre énergie atteint souvent son pic. Cependant, il faut faire attention, car l’augmentation des œstrogènes peut rendre nos ligaments plus lâches, augmentant ainsi le risque de blessures, notamment des ligaments croisés du genou. Une étude de l'INSEP (8) a montré que les sportives sont plus susceptibles de se blesser durant cette période. C’est pourquoi il est conseillé de rester vigilante lors des entraînements intenses durant l’ovulation.
Phase lutéale (avant les règles) :
À l'approche de nos règles, le taux de progestérone augmente, et nous pouvons ressentir une baisse d'énergie. Beaucoup d'entre nous se sentent plus fatiguées et éprouvent plus de difficultés à maintenir des séances d'entraînement intenses. Cette phase est souvent marquée par une rétention d'eau accrue et une efficacité métabolique réduite, ce qui peut entraîner un certain inconfort physique. Il est donc tout à fait normal d’adapter ses séances en fonction de son niveau d’énergie.
Le port de chaussettes ou manchons de compression peut également aider à réduire les sensations d'inconfort liées à la rétention d'eau en améliorant la circulation sanguine pendant et après l'effort. (9)
Pendant les règles
Une étude menée par Bruinvels (10) sur plus de 6 800 femmes a montré que les symptômes les plus fréquents pendant les règles sont les sautes d'humeur (90,6 %), la fatigue (86,2 %) et les douleurs au ventre (84,2 %). Il est donc normal de ne pas être au top pendant cette période, et adapter vos entraînements peut vraiment vous aider !
Optimiser l’entrainement en fonction des phases du cycle menstruel
Pour optimiser la performance sportive, il est crucial de suivre son cycle menstruel en identifiant les phases les plus favorables à un entraînement intense. En effet, chaque phase du cycle hormonal offre des opportunités uniques pour maximiser les adaptations et les résultats. Pour Juliana Antero, il est essentiel de comprendre les variations hormonales qui influencent la performance de manière cyclique, plutôt que de se concentrer uniquement sur les phases visibles et souvent associées à des ressentis négatifs, comme la menstruation. Apprendre à connaître l'ensemble du cycle menstruel permet de mieux adapter les entraînements et d'exploiter les moments les plus propices à l'effort. (11)
« Avoir le moindre doute sur son corps est la plus grande faiblesse qu'une sportive puisse avoir » Shawn Johson, Gymnaste (USA)
Le sport peut-il perturber votre cycle menstruel ?
Parfois, pratiquer un sport de manière trop intense ou sans équilibre nutritionnel peut avoir un impact sur le cycle menstruel.
Certaines femmes peuvent rencontrer une aménorrhée, c'est-à-dire l'absence de règles, lorsque leur corps manque d'énergie pour soutenir un effort physique trop important. Selon l'Inserm, l'aménorrhée peut être un signe de dysfonctionnement hormonal et entraîner des conséquences à long terme sur la santé osseuse et reproductive.(12) Il est essentiel de la considérer comme un signal d'alarme plutôt qu'un effet secondaire acceptable du sport de haut niveau.
Le syndrome Red-S (Relative Energy Deficiency in Sport*)
L'aménorrhée fait partie d'un problème plus large connu sous le nom de syndrome de déficit énergétique relatif dans le sport (RED-S), qui affecte les athlètes, notamment les femmes. Le syndrome Red-S survient lorsqu'il y a un déséquilibre entre la quantité d'énergie consommée et l'énergie dépensée lors des entraînements, ce qui affecte plusieurs fonctions physiologiques, y compris la santé hormonale et osseuse, le métabolisme, l'immunité, et les performances sportives.
Ce syndrome est plus commun chez les athlètes pratiquant des sports à forte intensité ou où la minceur est valorisée. L'INSEP et l'ANSES soulignent que le Red-S, s'il n'est pas pris en charge, peut entraîner des répercussions durables sur la santé physique et mentale des sportives.(13,14) Il est donc crucial de surveiller son alimentation, son entraînement, et de consulter un professionnel de la santé si des symptômes comme l'aménorrhée ou une baisse des performances apparaissent.
Suivre son cycle pour mieux adapter sa pratique sportive
Aujourd'hui, de plus en plus de sportives choisissent de suivre leur cycle menstruel pour mieux adapter leur entraînement. Des applications de suivi comme «Clue» ou plus spécifique au sport, «Ciclomi» , permettent de comprendre les fluctuations hormonales et d’adapter les séances en fonction des moments de son cycle. Une étude récente du British Journal of Sports Medicine a montré que les athlètes qui suivent leur cycle peuvent mieux anticiper les périodes de fatigue et maximiser leurs performances en ajustant l'intensité de leurs séances. (15)
Attention aux carences en fer pendant les règles
Les règles abondantes peuvent conduire à des carences en fer, ce qui est fréquent chez les femmes sportives. Le manque de fer peut provoquer une anémie, réduire l'apport d'oxygène aux muscles, et diminuer les performances. L’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire (ANSES) recommande une alimentation riche en fer pour prévenir ces carences, surtout chez les sportives à règles abondantes. (16)
Les limites : écoutez toujours votre corps
Même si le sport peut être bénéfique pendant les règles, il est important d’écouter son corps. En cas de douleur intense ou de fatigue excessive, il ne faut pas hésiter à ralentir ou se reposer. Le surentraînement peut aggraver les symptômes menstruels, et il est important de ne pas se forcer si le corps montre des signes de fatigue. Selon l'INSEP (17), une gestion adéquate des symptômes menstruels passe par un équilibre entre l’effort et la récupération, ainsi que par l’utilisation de protections adaptées pour le confort.
Des ressources inspirantes pour aller plus loin
Pour vous accompagner dans cette démarche et vous inspirer, voici quelques comptes et blogs à suivre qui parlent ouvertement du cycle menstruel et du sport :
- @fempower_sportives (Instagram) : Physiologiste spécialisée, Juliana Antero publie régulièrement sur les liens entre les hormones et l’activité physique.
- Guide gratuit « Le Cycle Menstruel et le Sport» : Ce guide en ligne publié par l'Institut National du Sport, de l'Expertise et de la Performance (INSEP) offre des conseils pratiques pour les sportives.
- EBOOK gratuit : Cycle Menstruel & Sport : La base de tout ce que les sportives devraient savoir sur elles-mêmes ! de Juliana Antero, chercheuse à l'INSEP spécialiste du cycle féminin et de ses impacts sur la performance.
- Podcast « Femmes et sport» : Ce podcast explore divers aspects du sport chez les femmes, y compris le cycle menstruel et comment il peut influencer les performances sportives, notamment l’épisode « Vos histoires # 7 – Marine Leleu – Le cycle menstruel, entre super pouvoir et vécu de la douleur »
En résumé
Bouger pendant les règles ne doit pas être une contrainte, mais plutôt une façon de mieux comprendre et respecter son corps. Le sport peut réduire la douleur, améliorer l'humeur et vous aider à vous sentir bien tout au long de votre cycle. Mais il est essentiel de ne pas négliger l’importance d’une alimentation équilibrée et d’écouter vos besoins. Nous sommes toutes différentes, et en apprenant à suivre votre propre rythme, vous trouverez ce qui fonctionne le mieux pour vous, que ce soit un jour de repos ou une séance d’entraînement intense !
*Relative Energy Deficiency in Sport : Déficit énergétique relatif dans le sport
Crédit Photo : @Avih N'Dabian
Sources :
(1) Journal of Physiotherapy, (Limen et al., 2016).
(2) Étude de l’Université de Lyon (2017) – Impact de l’exercice physique sur la dysménorrhée
(3) Étude de l’Université de Lausanne (2018) – Libération d’endorphines et réduction des douleurs menstruelles grâce à l’activité physique
(4) Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Inserm) – L’exercice physique comme traitement naturel de la dysménorrhée https://presse.inserm.fr/canal-detox/cest-normal-davoir-mal-pendant-les-regles-vraiment/ - consultée le 10 sept 2024
(5) Antero, J., & Meignié, A. INSEP - Influence du cycle menstruel sur les performances sportives.
(6) Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism. Impact des œstrogènes sur la laxité ligamentaire et les performances musculaires.
(7) Antero, J., & Meignié, A. INSEP - Influence du cycle menstruel sur les performances sportives.
(8) Antero, J., & Meignié, A. INSEP - Influence du cycle menstruel sur les performances sportives.
(9) R. J. Hill, C. R. Milligan, et al., Compression garments and exercise recovery: a systematic review and meta-analysis , publié dans Sports Medicine, février 2014
(10) Bruinvels, G., et al. (2021). Study on Menstrual Symptoms and Their Impact on Performance.
(11) Findlay, Rebekka J., Eilidh H. R. Macrae, Ian Y. Whyte, Chris Easton, et Laura J. Forrest (née Whyte). 2020. How the Menstrual Cycle and Menstruation Affect Sporting Performance: Experiences and Perceptions of Elite Female Rugby Players . British Journal of Sports Medicine
(12) Inserm, Troubles du cycle menstruel chez les sportives et leur impact hormonal, inserm.fr
(13) ANSES, Impact du syndrome Red-S chez les sportives et recommandations nutritionnelles, anses.fr
(14) INSEP, Guide pour les athlètes féminines : cycle menstruel et performances sportives, insep.fr
(15) Bruinvels, G., et al., Menstrual cycle tracking and athletic performance, British Journal of Sports Medicine, 2021.
(16) ANSES, Les carences en fer chez les sportives : prévenir l’anémie, anses.fr
(17) INSEP, Guide pour les athlètes féminines : cycle menstruel et performances sportives, insep.fr